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Droits de propriété intellectuelle et biodiversité:
Les mythes économiques

Fondation Gaia et GRAIN
Commerce Mondial et Biodiversité en Conflit
No. 3, Octobre 1998

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L'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) est en train d'accaparer un rôle déterminant dans la gestion internationale des systèmes de propriété intellectuelle. Son Accord sur les Aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce, ou ADPIC, définit de nouvelles normes en matière de droit sur la propriété intellectuelle auxquelles tous les membres de l'OMC doivent se conformer dans sept domaines. L'ADPIC est entré en vigueur en 1995, et devra bientôt être appliqué pleinement dans les pays en développement (l'échéance pour les pays en développement et les pays les moins développés étant respectivement 2000 et 2006). Des sanctions commerciales attendent les pays membres de l'OMC qui tarderont à mettre en oeuvre les directives de l'ADPIC.

Ce rapport examine les coûts et les bénéfices économiques de l'ADPIC, particulièrement pour les pays en développement qui sont riches en biodiversité. Il met en question trois mythes relatifs au rapport entre droits de propriété intellectuelle (DPI) et développement économique: le mythe du transfert de technologie, le mythe de l'innovation, et le mythe des investissements.

Pour les pays du Sud, les coûts de l'ADPIC pourraient bien être supérieurs aux bénéfices qui en découlent. Certes, les entreprises transnationales (TNC) y gagneront en termes de contrôle accru des marchés. Mais pour le Sud, le renforcement des DPI n'ira pas forcément de pair avec l'augmentation des investissements, le transfert de technologie ou la croissance économique. Certains secteurs, comme le secteur semencier ou médical, connaîtront une hausse des prix; des monopoles restreindront la liberté des firmes domestiques; et la balance des paiements dans les pays du Sud pourrait se déteriorer. Cela mènera, à plus long terme, à l'érosion du tissu socio-économique catalyseur de l'innovation au Sud.

Des gouvernements et des organisations non-gouvernementales qui s'inquiètent de l'impact des DPI et plus particulièrement de l'ADPIC sur les pays en développement sont encouragés à travailler pour:

  1. La suppression de l'obligation d'étendre les DPI aux variétés végétales pendant le ré-examen de l'Article 27.3(b) de l'ADPIC en 1999;
  2. Une réévaluation majeure des coûts et bénéfices de l'ADPIC durant la révision intégrale de l'Accord en 2000, et l'abandon du traité si les implications s'avèrent trop coûteuses pour le Sud;
  3. Le renforcement des instruments, mesures, et pratiques qui limitent l'expansion des monopoles des entreprises transnationales sur la biodiversité, par exemple la Convention sur la Diversité Biologique des Nations Unies (CDB);
  4. Des approches plus ingénieuses en matière d'incitation à la R&D qui ne soient pas détournées en faveur des puissances industrielles.

Les bénéficiaires principaux et directs de l'ADPIC seront vraisemblablement les promoteurs de la technologie et de l'information issus des pays industrialisés.

CNUCED, 19971

 

1. Introduction

Durant les pourparlers sur l'Accord Général sur les Barrières Douanières et le Commerce (GATT) de l'Uruguay Round, les pays en développement subirent des pressions pour accepter l'introduction de DPI comme élément nouveau du système multilatéral du commerce. L'argument-clé avancé par les pays industrialisés était simple: ils disaient que la faible protection des DPI fait obstacle au libre commerce. En 1988, au tout début des négociations, le représentant américain du commerce affirmait que près de 200 entreprises transnationales établies aux Etats-Unis se voyaient privées de $24 milliards de revenu en royalties par an à cause de la faiblesse des systèmes de DPI dans certains pays, principalement de pauvres pays du Sud2. Ainsi commença une campagne agressive pour aligner, à travers le GATT, les politiques nationales de DPI de tous les pays du monde sur une même base de protection minimum. En 1994, l'Accord sur les Aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce (ADPIC) était né comme produit final de l'Uruguay Round, qui ouvrait à la transformation du GATT en l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Les pays devaient signer ou bien tout le paquet des accords, ou bien rester en dehors du système multilatéral du commerce.

Les négociations de l'ADPIC, auxquelles seul un petit nombre d'Etats-membres du GATT participèrent, révélèrent clairement un conflit d'intérêts entre le Nord et le Sud. La proposition d'étendre le régime des brevets aux plantes, aux micro-organismes, aux biotechnologies, aux aliments et aux médicaments essentiels sous l'égide du système mondial du commerce soulevait des problèmes éthiques et légaux pour de nombreux pays en développement. Toutefois, ce sont les dimensions économiques des DPI qui en définitive attisaient l'opposition du Sud face à l'ADPIC. Des objections furent soulevées contre: l'imposition d'une approche standardisée en matière de DPI à travers des économies très diversifiées; le danger de permettre l'instauration de monopoles dans les secteurs alimentaire, médical, ou énergétique; l'accroissement des flux de devises du Sud vers le Nord; et la façon dont des DPI plus forts pourraient augmenter le fossé technique entre le Nord et le Sud, à cause de mauvais termes d'échange en matière d’'information scientifique. Les pays riches, pour leur part, ont insisté sur les retombées économiques positives dont bénéficierait le Sud avec des DPI plus forts, telles que: augmentation du transfert de technologie; encouragement des investissements étrangers; croissance économique; et amélioration du niveau de vie.

Ce document présente et critique les arguments économiques libéraux qui continuent d'être utilisés par des puissances industrielles pour rallier les forces en faveur des DPI internationaux standardisés. Le discours classique sur la relation entre les droits de propriété intellectuelle et le développement économique repose sur un certain nombre de "mythes économiques". Nous les appelons "mythes" car ils ne reflètent pas des réalités objectives. Pourtant, ils sont ingénieusement perpétués dans la conscience sociale alors même que les économistes sont profondément divisés sur ces questions. Il est aujourd'hui vital de résister à ces mythes et de s’en défaire. En 1999, plus de 130 gouvernements membres de l'OMC, qui sont tous sujets à l'ADPIC, réexamineront la partie du traité qui oblige l'extension des régimes nationaux des DPI au vivant, et spécifiquement aux obtentions végétales. En l'an 2000, l'intégralité de l'Accord sera réexaminée. Ce sont des occasions cruciales à saisir pour les pays en développement, s'ils souhaitent modifier l'ADPIC à la lumière de ses implications économiques réelles.

2. Les préjugées économiques de l'ADPIC

2.1. La technologie dans l'économie mondiale

La connaissance et la cristallisation de la connaissance sous forme de technologie sont des facteurs déterminants dans la production des biens et services, dans la compétitivité des pays et des entreprises, et dans la création et concentration des richesses3. La technologie soutient la globalisation, puisqu'elle permet aux entreprises d'organiser et de relier des unités de production dispersées afin de pénétrer les marchés mondiaux. Donc il n'est pas surprenant que la capacité des pays en développement à accéder à la technologie, et à l'utiliser pour augmenter leurs propres capacités industrielles, est devenu un objectif majeur des négociateurs commerciaux et simultanément des agences de développement internationales4.

Ces dernières décennies, l'émergence de nouvelles possibilités techniques a poussé de plus en plus à considérer le rôle moteur de la technologie dans le développement économique. Par exemple, des percées nouvelles en informatique, en matériels nouveaux et en génie génétique modifient le schéma de production des secteurs économiques, et altèrent la nature de la compétitivité entre entreprises et nations au niveau international5. Dans le cas de la biotechnologie, des secteurs de production et de distribution auparavant isolés – tels les secteurs semenciers, agrochimiques, pharmaceutiques et alimentaires – se sont retrouvés astucieusement liés. Etant donné que plus de 40% de la production mondiale est basée sur l'exploitation de la biodiversité6, il en résulte que toute technologie qui altère l'utilisation de la biodiversité à des fins productives aussi profondément que l'ingénierie génétique et le clonage, aura un vif impact sur les pays en développement. Ceux-ci sont non seulement considérés comme la source de 90% des ressources biologiques mondiales, mais la majorité de leur citoyens est privée de nourriture adéquate, de santé et de bien-être environnemental.

Le fossé technologique entre le Nord et le Sud se creuse. Les flux technologiques vers les pays en développement ont décliné fortement depuis le début des années 19807, tandis que la part des pays en développement en dépenses mondiales pour la R&D est passée de 6% en 1980 à 4% au début des années 19908. La libéralisation des marchés de capitaux est loin d'améliorer cette situation. La petite part (20-30%) du Sud en termes de recettes d'investissements étrangers directs (IED) s'est améliorée récemment, mais seule une poignée de pays a été touchée (Chine, Hong-Kong, Corée du Sud et Singapour). Au même moment, des accords commerciaux comme ceux administrés par l'OMC, les traités régionaux, ou le très controversé Accord Multilatéral des Investissements, sont rédigés en faveur des intérêts financiers des entreprises transnationales. Contrairement à l'idée qui circule, le renforcement des droits de propriété intellectuelle dans un tel contexte peut mettre les importateurs de technologie du Sud à l'écart.

2.2. Les DPI et la technologie

Le rôle des droits de propriété intellectuelle dans la production et la diffusion technologiques est débattu depuis des décennies. Théoriquement, les DPI, comme les brevets, devraient contribuer à l'équilibre entre l'incitation à la recherche et l'innovation d'une part, et la protection de l'intérêt du public au sens large d'autre part. Des systèmes de DPI, qui fournissent aux inventeurs des droits de propriété exclusifs sur leurs créations, sont supposés avoir un effet catalytique dans l'innovation technique. En fait, ceci ne peut pas être démontré. Il n'existe tout simplement pas de lien de cause à effet. Les brevets ne donnent aucune mesure de rien, à part les jugements qu'ils reflètent des bureaux de brevets sur le mérite technique d'une demande de protection en terme de nouveauté, d'applicabilité industrielle et de démarche inventive. Le nombre de brevets accordés dans un pays ne reflète ni l'intensité ni la qualité de la R&D de ce pays. Il n'indique pas non plus une activité économique concrète: la plupart des brevets ne sont que des titres imprimés sur un papier, dont l'invention ne sera jamais utilisée à des fins de production. Leurs bénéfices économiques ne peuvent pas non plus être pris en considération, statistiquement ou d'une autre manière. Toutes les inventions sont des améliorations d'inventions précédentes. La quantité totale de richesses que ces innovations successives pourraient représenter ne peut donc être déterminée. La plupart des entreprises n'intègrent même pas la valeur capitalisée des recouvrements de leurs brevet dans la déclaration de leur actif9.

Pour ces raisons et d'autres, les économistes doivent encore trouver les outils qui permettront de déterminer ou de comparer la valeur économique des brevets. Ceux-ci sont des titres qui autorisent l'utilisation ou la production de quelque chose supposé "nouveau" et utile. Comme tel, un brevet lui-même est une forme de connaissance désintégrée. Les brevets sont capitalisables sur le marché, et commercialisés. Mais ils ne nous apprennent rien de concluant sur l'économie ou l'activité innovatrice d'un pays. Analyser l'activité internationale des brevets – en essayant de comparer les systèmes de DPI et leur utilisation entre les différents pays – est on ne peut plus trompeur.

Donc, où se trouve le lien économique entre les DPI et la technologie ? Tout simplement dans les droits de propriété accordés pour une technologie donnée. La valeur économique d'un droit de propriété se retrouve dans le contrôle accordé au propriétaire du brevet sur la technologie concernée, les personnes qu'elle touche, la façon dont elle les touche, pour quelle période de temps, et à quel coût. Un brevet n'est pas lié à la santé d'une économie donnée, mais bien au contrôle potentiel du marché assuré pour le propriétaire du brevet. C'est la raison pour laquelle les pays industrialisés continuent à utiliser des DPI pour geler artificiellement leur privilège technologique dans l'économie globale.

3. Se défaire des mythes économiques de l'ADPIC

La justification économique des systèmes de propriété intellectuelle reposent sur de nombreux arguments. Trois d'entre eux sont aujourd'hui particulièrement utilisés afin de pousser à l'adoption de DPI plus forts dans les pays en développement. Ils ont des implications importantes pour la biodiversité indigène, et forment les principaux mythes relatifs à l'économie des DPI. Ce sont le mythe du transfert de technologie, le mythe de l'innovation, et le mythe des investissements étrangers directs ou IED.

3.1. Le mythe du transfert de technologie

L'affirmation empirique que les DPI exercent une influence sur le transfert de technologie est pour le moins peu concluante. La littérature sur le transfert de technologie ne contient rien de tangible et d'évident qui justifierait l'adoption de politiques économiques libérales dans le Tiers-Monde, ou le renforcement des DPI comme moteurs de flux technologiques du Nord vers le Sud. Il est clair que le marché international de la technologie – s'il existe – est imparfait, et les conditions actuelles sont fortement détournées en défaveur des pays en développement qui souhaitent gagner l'accès à de nouvelles techniques.

Vaille que vaille, la capacité d'un pays à générer de la technologie se mesure typiquement par : (1) les dépenses en R&D, et (2) le nombre de brevets internationaux y étant déposés par des entreprises et des citoyens de différents pays. Des statistiques fournies par le bureau des brevets des Etats-Unis sont généralement utilisées comme référence sur la capacité comparative des pays à innover technologiquement.

Connaissance, ADPIC et OMC

L'ADPIC altérera de façon fondamentale la politique économique internationale de la connaissance et de la technologie. L’Accord établit des règles normalisées pour sept catégories de propriété intellectuelle au niveau mondial. Tout membre de l'OMC doit appliquer ces règles, et le système sera administré par le mécanisme de règlement des différends de l'OMC. Pour la première fois, beaucoup de pays en développement et de pays les moins développés membres de l'OMC devront octroyer des droits de propriété intellectuelle dans tous les domaines de la technologie10. Les règles sur les brevets de l'ADPIC incluent de nouvelles restrictions sur l'utilisation des licences obligatoires par les gouvernements qui sont à la recherche de technologie étrangère11.

L'Accord oblige également les États à octroyer des droits de monopole pour une catégorie de produits et de technologies qui jusqu'à présent avait été exclue des régimes de DPI de nombreux pays. Ceux-ci sont par exemple les produits pharmaceutiques, agro-chimiques, et les produits et procédés biotechnologiques. En particulier, l'Article 27 de l'ADPIC impose des DPI sur les micro-organismes, les procédés microbiologiques et les obtentions végétales. Des droits de monopole sur les variétés de plantes, comme le riz "basmati", peuvent être exercés soit par brevet, soit par un système de droits sui generis.

Toutefois, cette disposition spécifique sera réexaminée et éventuellement modifiée en 1999, un an avant l'échéance qui obligera les pays en développement à la mettre en œuvre. Les DPI ont traditionnellement été limités et définis par des systèmes nationaux, et comme tels ont été sujets aux spécificité des politiques industrielles des Etats souverains12. Les vertus économiques libérales prônées par l'ADPIC ont étendu la logique de ces hypothèses à l'économie politique mondiale, par laquelle elles s'imposent particulièrement au monde en développement.

 

Tableau 1: Principaux pays générateurs de technologies, classés selon la valeur de leurs dépenses en R&D13

Pays

Dépenses en R&D

1993

Brevets US déposés

1977-96

Commissions technologiques perçues 1993

Sortie d'investissement étranger direct 1995

 

(Milliards $US PPP)

% du total

(Milliards $US PPP)

% du total

(Milliards $US PPP)

% du total

(Milliards$US PPP)

% du total

Etats-Unis d'Amérique

166.3

39

985.3

57

20.4

40

95.5

30

Japon

74.4

17

307.6

18

3.6

7

21.3

7

Allemagne

37.1

9

136.2

8

7.3

14

35.3

11

France

26.4

6

52.7

3

2.0

4

17.5

6

Royaume-Uni

21.6

5

52.8

3

2.9

6

37.8

12

Italie

13.2

3

22.1

1

0.9

2

5.1

2

Canada

8.4

2

34.4

2

0.9

2

4.8

2

Pays-Bas

5.1

1

16.9

1

6.2

12

12.4

4

Suède

4.8

1

17.3

1

0.4

1

10.4

3

Suisse

4.2

1

25.5

1

2.0

4

8.6

3

Premiers 10 pays

361.5

84

1650.8

95

46.6

91

248.7

79

Monde

428.6

100

1732.0

100

51.0

100

315.0

100

Le tableau 1 indique que la génération des technologies brevetées se concentre dans 10 pays seulement. Ces derniers interviennent pour 84% dans les dépenses annuelles mondiales en R&D et contrôlent 95% des brevets déposés aux Etats-Unis au cours des deux dernières décennies. Ces pays capturent 91% de tout revenu sur les licences transfrontalières et sur les transferts de technologies dans le monde14. Les Etats-Unis contrôlent 43% de toutes les commissions de transfert de technologie perçues parmi les pays de l'OCDE, suivis par l'Allemagne (15%), les Pays-Bas (13%) et le Japon (7%)15. La somme de royalties et de commissions s'écoulant vers ces pays s'est accrue de 7,5 milliards de $US à 28 milliards de $US entre 1984 et 1988. En 1996, l'économie américaine a amassé 30 milliards de $US en royalties et frais de licence. Les pays en développement, pour leur part, déboursaient en 1995 18 milliards de $US en paiements de transfert de technologie.

Le niveau de concentration des détenteurs de technologies brevetées est extraordinairement élevé. Les pays industrialisés détiennent 97% de tous les brevets existants16. Les 50 premières entreprises mondiales possèdent plus d'un quart de tous les brevets déposés aux Etats-Unis. Aux Etats-Unis et en Allemagne, en 1983, 12% des dépenses en R&D provenaient de 5 firmes seulement. En Europe, 81% de toutes les dépenses suisses et 69% des dépenses hollandaises en R&D sont imputables à quatre entreprises. Cela signifie que les entreprises transnationales forment un véritable oligopole de la propriété et de l'exploitation des capacités technologiques mondiales.

L'augmentation des alliances techniques stratégiques entre firmes et les accords de licence entre entreprises transnationales et universités ou institutions de recherche gouvernementales, avec à la clé des droits concomitants d'accès préalables aux résultats de la recherche, soulignent un resserrement du contrôle de la connaissance. Comme Kumar le fait remarquer,

Il se peut que les plus grandes entreprises des principaux pays industrialisés exercent un contrôle plus fort sur la technologie que ne le laisse supposer leur part de brevets.17

En effet, 92% de toutes les alliances technologiques stratégiques ont été contractées entre 1980 et 1989 par la triade du Nord constituée par les Etats-Unis, le Japon, et l'Union Européenne.18

La plus grande part des transferts de technologie en cours aujourd'hui se présente sous la forme de fusions et d'acquisitions transfrontalières. Selon la CNUCED, 70% des paiements mondiaux de royalties et commissions sont des transactions entre les compagnies parentes et leurs filiales étrangères.19 En 1996, le niveau des investissements des entreprises transnationales dans leurs filiales internationales atteignait 1.4 trillards de $US, desquels un quart seulement était financé par des flux d'IED.20 Donc, 'le transfert de technologie' concerne réellement les plus grandes firmes déplaçant la technologie et le capital à travers des frontières géopolitiques, mais ce à l'intérieur de leurs propres frontières corporatives.

Deux des plus grands facteurs qui déterminent la volonté des entreprises transnationales à des technologies sont la taille du marché et les capacités technologiques du pays bénéficiaire. A l’évidence les pays en développement ne sont pas des destinations attractifves pour les transferts de technologie, à cause du degré relativement faible de leurs capacités technologiques indigènes. Cette capacité est définie comme étant à la fois la possibilité d'innover techniquement et la possibilité d'adapter et modifier une technologie déjà existante. La plupart des entreprises transnationales conduisent leur R&D dans leur pays d'origine, principalement en fonction des économies d'échelle, de la capacité technologique prévalent dans les pays en développement et de la proximité au point de consommation. La R&D conduite à l'étranger est habituellement de bas niveau technique ou vise la simple adaptation des produits aux marchés locaux.21 L'âge moyen des technologies transférées aux filiales des entreprises transnationales dans les pays en développement est souvent plus élevé que celui des technologies transférées aux filliales qui se trouvent dans les pays développés.22 Cela rend la création d'opportunités technologiques dans le Sud plus difficile, d'autant plus que les frontières technologiques avancent très rapidement au fur et à mesure de l'intégration de technologies de pointe dans l'économie mondiale.

Aujourd'hui, les pays en développement se retrouvent face à un terrible dilemme. Ils sont plus dépendants que jamais des entreprises transnationales pour le transfert de technologie et l'investissement étranger. Alors qu’ ils ont déjà été tenus à l'écart de ces flux, le régime de propriété intellectuelle obligatoire de l'ADPIC pourrait sérieusement exacerber cette situation d'exclusion. La protection par brevet encouragée par l'ADPIC limitera définitivement les retombées de la R&D – ou le goutte à goutte technologique – qui pourrait se produire si la technique est adaptée aux marchés des pays en développement.

3.2. Le mythe de l'innovation

Plusieurs études sérieuses ont souligné le manque de pertinence du système de brevet pour l'innovation. Kamien et Schwartz, et Firestone, ont montré que la compétition pour les parts de marché est ce qu'il y a de plus stimulant pour les investissements en R&D par les entreprises.23 Une étude de 1985 conduite par la CNUCED, couvrant cent entreprises, a établi que le rôle des brevets dans l'innovation n'est pas seulement spécifique au secteur, mais diffère selon les pays.24 Il n'y a pas de lien inter-sectoriel entre les DPI et l'innovation. Cohen et Levin ont montré que les brevets sont significatifs pour l'innovation dans certaines industries seulement, avec un succès maximum dans les domaines pharmaceutiques et chimiques, où seulement respectivement 60% et 30% d'innovations sont dues à la présence de DPI.25 Et même dans les secteurs où le rôle des DPI est significatif, ceux-ci produisent des effets secondaires pervers. Une étude récente de Michael Kremer réaffirme la relation fortement déformée entre l'industrie du médicament et la brevetabilité, où les DPI incitent à l'augmentation des prix et à une consommation plus faible.26

Les dépenses gouvernementales en R&D et la protection des industries naissantes ont contribué à la production novatrice de marchés développés et émergeants. L'expérience japonaise et sud-coréenne soulignent toutes deux le rôle central d'une forte intervention de l'État à cet égard. Des résultats chiffrés sur les programmes de R&D et les investissements des gouvernements de pays développés soulignent également le fait que, en général, le secteur privé commercialise essentiellement les fruits de la recherche publique. Ce fait est indéniable dans le domaine de la biotechnologie en Europe, au Japon et aux Etats-Unis. L'argument économique libéral qui pousse à l'adoption des DPI sous prétexte qu'ils constituent la meilleure incitation à l'invention se base sur l'hypothèse que les firmes privées sont responsables de la génération de toute technologie. C'est tout simplement faux: l'intervention de l'État joue un rôle énorme dans le développement des capacités technologiques (voir tableau 2).

Tableau 2: Rôle du gouvernement en R&D (1992)27

 

% de la part gouvernementaledans les dépenses en R&D totales

% de la part gouvernementale directe introduite dans la R&D réalisée par les entreprises

France

48.8

19.8

Allemagne

37.0

10.7

Royaume-Uni

34.2

14.6

Etats-Unis

47.0

28.3

Les retombées de la recherche publique et de la R&D sont peut-être les sources les plus importantes d'innovation dans le Nord. Les semi-conducteurs ont émergé de la recherche militaire aux Etats-Unis, ainsi que de nombreux matériaux nouveaux comme le Teflon. Les techniques et procédés de base en biotechnologie proviennent des laboratoires universitaires américains et britanniques, et non pas des entreprises. Le renforcement des DPI privés devrait logiquement avoir des effets significatifs sur la recherche publique et des retombées sur la R&D du secteur public au secteur privé. Si les arguments libéraux concernant la relation entre les DPI et l'innovation sont faux, alors la restructuration des régimes de DPI ou d'investissements, pour ne pas parler des politiques technologiques gouvernementales, pourrait amorcer un net déclin dans la production mondiale de technologie.

On commet deux erreurs majeures en cherchant à lier les DPI et l'innovation. Il est d'abord évident qu'une part non négligeable d'innovation et de développement technologiques se passent en l'absence totale des DPI, ou en tous cas sujette à de profondes incertitudes quant à la disponibilité même de ces droits. Ceci est particulièrement vrai pour l'innovation dans les pays en développement, qui ont généré et géré la biodiversité dont dépend le monde pour l'alimentation, la médecine, la construction et l'habillement, sans aucun régime de DPI.

Les paysans n'ont jamais considéré leur semences comme une propriété privée, mais les ont échangés gratuitement de façon à ce que toute innovation ne bénéficie pas uniquement à eux-mêmes mais aux autres également. Depuis la fin des années 1970s, les entreprises transnationales ont investi énormément en biotechnologie sans aucune garantie de pouvoir bénéficier de droits de propriété exclusifs sur leurs inventions. Des régimes de brevets ouverts aux inventions biotechnologiques se sont limités aux Etats-Unis et au Japon. L'Union Européenne n'a pas encore mis en œuvre son régime de brevetabilité biotechnologique, tandis que des marchés majeurs du Sud tels que la Chine, le Brésil et l'Inde, commencent seulement à mettre le leur sur papier, et sont encore loin de le mettre en pratique. Malgré tout, des centaines de milliards de dollars ont été versés par le secteur privé en R&D biotechnologique.

Le second défaut majeur du lien entre DPI et innovation est l'idée que les DPI inciteraient idéalement à l'innovation. En fait, il existe beaucoup d'incitations à l'innovation, y compris un véritable bataillon d'outils fiscaux comme les subventions et avoirs fiscaux, tous destinés à manipuler l'aversion intrinsèque du secteur privé face aux risques de la R&D.28 Le déploiement de ces mesures fait partie de ce qu'on appelle "la correction des erreurs du marché" par les gouvernements.

Tableau 3: Arguments économiques en faveur et contre des DPI forts dans les pays en développement

Pour

Contre

La génération de technologies stimulées par les DPI forts provoque la croissance et l'amélioration du niveau de vie. Le 'facteur le plus important' dans le développement des DPI n'est pas le remboursement économique anticipé du côté des pays en développement, mais clairement 'la politique de coercition' exercée par les pays industrialisés, en particulier les Etats-Unis.29 De la fin des années 70 au début des années 80, le gouvernement américain a reconnu qu'un fossé technologique structurel s’approfondissait sérieusement entre son économie et celle du Japon. Dès lors, les mesures s'orientèrent agressivement vers le maintien des avantages artificiels dont bénéficiait encore l'industrie américaine, avec l'instauration de DPI étrangers étendus, couplés à des mesures faibles en politique antitrust et des mesures fortes en politique de concurrence.30
Stimulation de l'investissement Les entreprises biotechnologiques dépensent 7,5 milliards de $US en R&D par an, et en 1995, plus de 12 milliards de $US furent investis dans le secteur,31 en dépit de systèmes de protection par brevet faibles ou incertains dans de nombreux marchés mondiaux parmi les plus importants – y compris l'Union Européenne. La directive de l'UE sur la brevetabilité de la biotechnologie n'est pas encore entrée en vigueur qu'elle est déjà disputée à la Court Européenne de Justice. La motivation du profit, sans recours aux DPI, semble être assez efficace à elle seule, même dans le domaine de la technologie de pointe, ou dans les secteurs de R&D à haut risque. Ceci illustre bien le constat des économistes montrant qu'il n'existe pas de corrélation entre l'investissement et les DPI, de et que la relation entre investissement en R&D et accroissement économique n'est pas confirmée.32
Attraction de l'investissement étranger direct (IED) La plupart de l'IED est concentré dans les mains d'un petit nombre d'entreprises et s'écoule au-delà des frontières mais au sein de ces mêmes firmes.33 Dix pays en développement uniquement absorbent 80% de tous l'IED s'écoulant vers le Sud. Ceci doit être contrebalancé par le remboursement des licences et royalties que tous les pays en développement doivent aux détenteurs de DPI étrangers, qui drainent de précieuses réserves en devises.
Stimulation du transfert de technologie du Nord vers le Sud Il est estimé que 70% des paiements globaux de royalties et de frais de licences (évidence directe de transfert de technologie) sont composées de transactions entre les entreprises transnationales et leurs filiales étrangères.34 L'ADPIC requiert que l'importation par le Sud de produits ou de procédés brevetés soit considérée équivalente à l'exploitation du brevet dans le pays acheteur, ce qui donne une illusion de transfert de technologie.
Stimulation de la recherche et de l'innovation … La relation entre les monopoles et l'innovation est précaire. Principalement, les DPI délimitent des frontières territoriales autour des technologies et d'autres inventions, de sorte que les entreprises puissent prélever des rentes plus élevées (maximisation du profit). Il n'y a pas de relation inhérente entre brevets et R&D.
… qui permette aux inventeurs de récupérer les coûts de la R&D L'évidence empirique montre que dans les pays développés, l'industrie récupère 15-20% de ses frais de R&D par des brevets, tandis que dans des pays comme l'Inde, le chiffre pour un inventeur national tombe à 0,5-2%.35 La raison souvent citée est la nature adaptative de l'invention indienne, ce qui implique que des droits de brevets forts ne sont pas le mécanisme adapté à la création de profits sur les dépenses en R&D. Dans le secteur public aux Etats-Unis, la recherche parrainée par le gouvernement à travers le système universitaire a atteint en 1995 82 milliards de US$, générant 20.000 dépôts de brevets, et 1,5 milliards de $US en royalties – un maigre retour de 2% sur l'investissement.36 Cela renforce l'argument de ceux qui réclament le retrait des investissements publiques dans la recherche académique au vu des faibles incidences économiques même dans le cas des politiques de brevetage agressives adoptées par les universités.
Les bénéfices qui résultent du dévoilement public des inventions compensent les coûts des monopoles artificiels sur le marché. Cet argument ne tient pas debout. Les DPI ne garantissent pas la divulgation. Le secret commercial est la principale méthode de protection de l'invention dans 43 secteurs de l'économie américaine, spécialement dans les secteurs de l'informatique et de la biotechnologie.37 Dans l'industrie biotechnologique, la divulgation écrite de l'invention a été remplacé par le dépôt physique d'échantillons, qui ne sont pas disponibles au public. Les entreprises déploient beaucoup d'efforts pour empêcher la divulgation de leurs portefeuilles de brevets.38 Aux Etats-Unis, les demandes de brevets rejetées – la majorité de tous les dépôts – sont tenues secrètes. Même si ces demandes présentent un certain intérêt technique, les chercheurs auront uniquement accès à la fraction de l'information technologique considérée comme digne d'intérêt par le bureau des brevets.39 En conséquence, les systèmes de DPI forts peuvent être la cause de dédoublement coûteux de l'investissement en R&D, ou de la course aux brevets caractérisée par des frais de mise en application élevés.40
Encouragement de la technologie, un moteur du bien-être économique national Une enquête récente réalisée aux Etats-Unis met en pièces cette idée. Plus de 80% des entreprises contactées ont indiqué qu'une de leurs principales motivations en stratégie de brevet était de bloquer des champs techniques, sans avoir aucune intention d'exploiter les inventions. Les brevets sont dans ce cas des atouts pour la négociation de licences. En d'autres termes, le système de brevets régule la compétition. Il ne stimule pas nécessairement la génération de technologie, encore moins sa divulgation.
Les DPI sont essentiels à la libéralisation du marché Le DPI est une distorsion du marché en lui-même: c'est un monopole sanctionné par le gouvernement et une subvention. Dans les marchés ouverts, le DPI est un mécanisme régulateur de la compétition entre les entreprises, mais ne protège pas le marché des barrières commerciales, car c'est, en lui-même, une barrière commerciale. A plus long terme, un système de DPI fort peut mener à des discriminations de prix selon l'élasticité de la demande.41 Centralisation des brevets, ventes ficelées, licences croisés, refus de licences, restrictions territoriales et de nombreuses autres pratiques anti-compétitives sont monnaie courante dans les pays où existent des régimes de DPI forts.42 Dans le cas où ils sont mis en œuvre en l'absence de règlements plus larges relatifs à la compétition et à la prévention de trusts, les DPI peuvent permettre aux entreprises un contrôle excessif des marchés.
C'est un système démocratique non discriminatoire, sujet à une pleine participation du public Le contraire est vrai: c'est un système élitiste et coûteux. Un brevet doit être défendu par son propriétaire, pas par le gouvernement. Aux Etats-Unis aujourd'hui, un procès typique portant sur une seule revendication coûte entre 25.000 à 200.000 $US, tandis que les frais de litige pour violation s'élèvent à 1 million de $US aux Etats-Unis et 600.000 US$ en Europe.

L'absence de protection par brevet des innovations biotechnologiques dans de nombreux pays met en évidence la faiblesse de cet argument. La plupart des firmes préfèrent utiliser la période d'avance («lead time») et le secret plutôt que de recourir à la diffusion publique de leurs inventions, comme la brevetabilité le requiert, pour protéger ce qu'elles considèrent comme leur propriété intellectuelle. Cette pratique s'accroît.43 Comme le conclut une étude sur la situation dans la Coopération Economique des pays de l'Asie-Pacifique (APEC),

les règles de propriété intellectuelle ne sont pas les seules, ni nécessairement les plus importantes, mesures gouvernementales affectant l'innovation. Le taux de brevets contribuant réellement à la recherche et développement aux Etats-Unis et partout ailleurs est en déclin.44

L'ADPIC renforce également la fausse thèse de la valeur incitative des DPI en exigeant l'application universelle d'une politique en la matière. Beaucoup prévoient que l'imposition des DPI dans le Sud aura des conséquences désastreuses pour l'innovation et l'économie indigènes. La présence de produits d'origine étrangère sur le marché domestique réduira la demande pour les marchandises équivalentes produites localement, et sera donc néfaste à l'innovation locale.45 De plus, l'ADPIC requiert aux pays membres de traiter l'importation de biens et de services protégés par DPI chez l'exportateur comme l'exploitation de l'invention dans le pays importateur. Cela va étouffer dans le futur l'innovation du Sud, et dans le même temps priver les entrepreneurs locaux d'accès à la technologie sous une autre forme que le produit fini. Les innovateurs locaux auront de plus en plus besoin de démonter («reverse engineer») des technologies de façon à outrepasser les restrictions des DPI pour s'attaquer à la déterioration des termes de l’échange et d'accès à l'information scientifique. Cette pratique est mal vue par les grands détenteurs de brevets. Combinée avec des budgets de plus en plus réduits pour l'éducation publique sous les prescriptions du Fonds Monétaire International, ces mesures vont effilocher le tissu innovateur de nombreux pays en développement. Elles ignoreront totalement les processus technologiques créatifs non reconnus par les régimes de DPI occidentaux tels que l'ADPIC.

3.3. Le mythe des investissements étrangers directs

L'ADPIC et les autres accords de DPI relatifs au commerce expriment une compréhension erronée du lien entre investissement et DPI. La propagande émanant des économistes libéraux affirme qu'une protection par DPI forts est nécessaire pour attirer l'investissement, particulièrement l'IED.46 L'IED est la forme préférée de l'investissement externe aujourd'hui: il fournit la promesse à long terme de capital stable pour les pays bénéficiaires, par opposition à l'investissement spéculatif. Il s'est énormément développé ces dernières années, poussé par la libéralisation des marchés financiers et des lois sur les investissements. La réserve globale des IED a quadruplé entre 1982 et 1994. En 1996, elle se trouvait à 3,2 trilliards de $US, ou 9% du PIB mondial. Le débit total a pour la première fois atteint le plafond de 300 milliards de $US en 1995.47 Les pays industrialisés comptent pour 80% des débits des IED et 60% des entrées. La plupart des IED en partance pour le Sud sont destinés à la Chine (y compris Hong-Kong), la Corée du Sud et Singapour. La plupart de leurs flux sont constitués par des fusions et des acquisitions.

L'analyse critique des IED nous apprend plusieurs choses importantes. La première est qu'il n'y a pas de lien causal entre l'IED et la croissance économique.48 Comme le soulignent de nombreux experts, les études sur les facteurs déterminants de la croissance ont souvent laissé les IED en dehors de leur calcul. En réalité, la libéralisation des régimes de commerce et d'IED mènent à la récession dans les économies nouvellement industrialisées, dans la mesure où elle perturbe les marchés du travail et restreint donc la consommation.

De plus, l'évidence montre que les flux des IED sont de loin plus sensibles aux modifications des variables économiques à court-terme, comme les taux de changes, qu'aux variables à long terme telles que la disponibilité ou la force des DPI (comme les récents événements du Sud-Est asiatique l'ont clairement illustrés). La CNUCED l'a souligné en termes non équivoques: les régimes de DPI constituent un facteur relativement peu significative pour l'IED.49

Une façon de comprendre qu'il n'existe pas de corrélation entre l'entrée d'IED et les droits de propriété intellectuelle est d'examiner attentivement les investissements en R&D des entreprises transnationales outre-mer.50 Clairement, de forts DPI sont souhaités par les entreprises transnationales possédant une activité de production et des unités de recherche outre-mer. Ceci n'est cependant pas un prérequis. La plupart de la R&D conduite par les filiales outre-mer des entreprises transnationales est de nature adaptative: les produits et procédés dépendent de la conjoncture des marchés locaux et des conditions de fabrication industrielle. Il en ressort que la R&D à hauts risques et les inventions «big bang» n'occupent pas la première place de l'agenda. Les entreprises transnationales sont même encouragées par de faibles régimes de DPI dans le Sud. De tels régimes tendent à protéger les adaptations locales d'innovations étrangères mieux qu'ils ne protègent les innovations étrangères elles-mêmes. Donc, les entreprises transnationales peuvent pratiquer la recherche adaptative et s'emparer du marché à plus faible coûts. Finalement, déterminer l'endroit où aura lieu la R&S outre-mer dépendra d'abord de l'infrastructure de recherche locale plutôt que de la disponibilité de forts DPI, spécialement dans les industries chimiques et alimentaires.

Une autre façon d'aborder le mythe de l'IED est de se demander pourquoi la part des entrées d'IED dans les pays en développement a augmenté tandis que leur part dans le transfert de technologie global a diminué. Une des raisons est que la Chine, de nouveau, absorbe la plus grande part de l'explosion de l'IED ces dernières années. Ces conclusions ne montrent pas de corrélation avec un renforcement des DPI. Ni la Chine, ni les nombreux pays en développement du Sud attracteurs d'IED n'ont développé leurs systèmes de DPI.

4. Les coûts économiques de l'ADPIC

Toute analyse économique de l'ADPIC devrait englober non seulement les retours financiers présumés vers les pays en développement, mais aussi les coûts. Il est douteux qu'il y ait des retours significatifs. Les entreprises transnationales seront sans aucun doute encouragées à étendre les ventes des biens et services protégés par DPI sous un climat général de renforcement de la propriété intellectuelle. Cette situation affectera particulièrement les biens protégés par droits d'auteur. Dans le domaine du brevet, des restrictions sur les licences obligatoires et le traitement de l'importation en tant qu'exploitation des brevets encouragera l'expansion de certains marchés.

Toutefois, le Sud ne devrait pas s'attendre à un accroissement ou une amélioration de ses ressources de base en faveur du développement national, comme l'investissement, le transfert de technologie et le renforcement de l'innovation locale. Ces derniers ne seront pas favorisés par l'ADPIC ou tout autre accord lié aux DPI. Certains coûts résultant de la mise en oeuvre de l'ADPIC ont été analysés par la CNUCED et quelques autres auteurs. D'autres peuvent être déduits d'études plus générales sur l'implication de la réforme des DPI pour le Sud. Il en ressort deux catégories de coûts: les coûts directs et les coûts cachés.

4.1. Les coûts directs de l'ADPIC

La mise en oeuvre de l'ADPIC dans les pays en développement amène un certain nombre de coûts directs. Ceux-ci sont évidents – mais en aucun cas négligeables.

Le premier résulte non seulement de la révision des lois, mais également du renforcement obligatoire des systèmes judiciaires et administratifs lors de la mise en oeuvre de l'ADPIC. Les coûts de réforme de tels systèmes varient de pays à pays. Au Chili, ils pourraient atteindre 1,5 millions de $US, en Egypte 1,8 millions de $US, au Bangladesh plus de 1,4 millions de $US et en Tanzanie au moins 1 à 1,5 millions de $US. Ces estimations ont été préparées pour la CNUCED, qui dans certains cas omet les coûts de formation du personnel.51 On craint que les budgets nécessaires pour de telles réformes administratives, juridiques et judiciaires détourneront les ressources nationales des programmes socio-économiques de base, spécialement dans les pays les moins développés.52

Un autre coût direct facilement anticipé proviendra des entreprises – qui jusqu'à l'avènement de l'ADPIC produisaient des contrefaçons, comme des copies de produits audiovisuels, de vêtements ou d'articles de luxe – qui souffriront un déclin de leur production. Cela signifie des pertes d'emploi et la récession économique des économies nationales. Pour les pays producteurs ou plaques tournantes des biens contrefaits, la note sera salée.

Troisièmement, les frais de licence et l'augmentation des prix seront responsables d'un déclin de la production pharmaceutique des pays en développement. Pour les pays à faible compétitivité – c'est-à-dire la plupart des pays en développement – cette situation sera extrêmement néfaste. Les pauvres ne peuvent tout simplement pas se permettre l'achat de médicaments chers, et l'ADPIC autorisera les entreprises pharmaceutiques étrangères non seulement à augmenter les prix de façon considérable, mais également à déclarer illégales les importations parallèles et les versions génériques de médicaments brevetés.

4.2. Les coûts cachés de l'ADPIC

Un nombre assez important de coûts cachés résulteront de l'ADPIC: certains directs, d'autres indirects; certains dérivant explicitement de l'ADPIC, d'autres relatifs aux DPI en général. Nous avons seulement retenu les principaux d'entre eux.

  • Le coût des monopoles

L'expansion des monopoles au niveau mondial résultant de l'ADPIC provoquera une augmentation des prix de certains marchés et un lock-out des alternatives meilleures -marché. L'effet net dans le secteur pharmaceutique a été largement démontré: les gens ne peuvent pas se payer un traitement coûteux et la consommation décline, tandis que les entreprises recouvrent la perte théorique résultant de la diminution des ventes par une hausse excessive des prix. La société paie directement et indirectement les coûts de tels monopoles. Economie reposant sur une maximisation de la rente, dédoublement de la R&D, centralisation des brevets, abus de licence, et un jeu complet de comportements anti-compétitifs sont extrêmement bien connus dans les pays de l'OCDE. Les pays développés ont donc essayé de les contrôler par des politiques de concurrence et des lois anti-trusts en particulier. L'ADPIC a été pensé et sera mis en œuvre sans que de telles mesures ne soient requises.

C'est réellement une perspective décourageante. En l'absence de politiques de concurrence qui restreignent les pratiques de licence et protègent l'intérêt public plus large, et sans loi anti-trust pour bloquer la formation de monopoles, les pays du Sud seront incapables de gérer les 'distorsions' subséquentes du marché. Et parce que l'ADPIC et les différentes lois DPI-plus53 ouvrent en grand les portes à la brevetabilité des produits biologiques et des procédés affectant l'alimentation et la santé, les couches pauvres des pays du Sud souffriront encore plus de ces distorsions.

  • Les flux de revenus contraires

L'expansion de normes minimum élevées pour la protection par DPI dans tous les Etats-membres de l'OMC provoquera des flux de revenus du Sud vers le Nord plus importants et pervers. Une des raisons en est que le Nord est de loin l'acteur principal dans le système des DPI. Même dans les pays en développement qui ont des systèmes de brevet dynamiques, on constate que la plupart des titres sont délivrés aux étrangers. L'ADPIC renforce cette situation par l'application d'un des règles d'or de l'OMC, à savoir le 'traitement national', par lequel les étrangers doivent jouir exactement du même degré de droits de propriété intellectuelle que les citoyens d'un pays donné.

Les sorties de royalties sont simplement destinées à augmenter, s'ajoutant à la pression sur les réserves de devises. Les fabricants américains attendent des pays du Sud 202 millions de $US et 2,5 millions de $US respectivement en royalties agrochimiques et pharmaceutiques jusqu'ici impayées.54 Ce scénario est particulièrement injuste dans le cas des industries liées à la biodiversité. Une étude publiée par le Programme des Nations-Unies pour le Développement montre que les vrais pirates des royalties sont les entreprises transnationales elles-mêmes, pas les pays en voie de développement. Si des royalties de 2% étaient perçues sur la diversité biologique développée et protégée par les innovateurs locaux du Sud, le Nord aurait plus de 300 millions de $US en royalties impayées aux agriculteurs pour les semences agricoles, et plus de 5 milliards de $US impayés pour les plantes médicinales.55

  • L'érosion du tissu d'innovation dans le Sud

On parle peu du fait que les DPI, considérés comme des outils incitant à l'innovation, provoquent l'effet inverse. Les brevets aux revendications larges peuvent avoir l'effet pervers d'arrêter la R&D. Ce phénomène a été documenté dans plusieurs domaines (par exemple l'industrie des oléagineux). En fait, la 'technologie de blocage' est devenue la stratégie de pointe de la brevetabilité aujourd'hui.56 Cela signifie que non seulement les adaptations de technologies brevetées sont stoppées mais en plus les moyens de production complètement alternatifs – qui peuvent être moins nocifs pour l'environnement et moins coûteux pour le consommateur – ne sont pas poursuivis.

Les coûts de cette déincitation n'ont pas encore été calculés, à notre connaissance. L'extension des DPI à la biodiversité dans les pays industrialisés a provoqué une réduction des flux des ressources génétiques et de l'information, spécialement dans le secteur des plantes.57 Les pays en développement ne peuvent se permettre cela. Ajouté à l'absence de tout lien entre DPI et investissement, ces pays verront leurs propres termes d'accès à l'information scientifique diminuer. Ceci va éroder leur capacité à générer des technologies indigènes, ne laissant pour unique option aux scientifiques nationaux que de travailler pour les entreprises transnationales.

Impacts de l'ADPIC dans le secteur semencier

La graine, tout autant que le sont la terre et l'eau, est la base de la production agricole et des systèmes vivriers. L'agriculture représente une partie chiffrable du PIB de la plupart des pays industrialisés et une part énorme du PIB des pays du Sud. Les lois de DPI – brevets ou protections de l'obtention végétale de type sui generis – ont provoqué une concentration importante dans le secteur semencier au cours des dernières décennies, concentration accompagnée par l'intégration verticale de l'amélioration des plantes avec les entreprises agrochimiques et agro-alimentaire.

Les 10 premières entreprises semencières contrôlent actuellement 30% du marché commercial mondial de la semence – qui atteint 30 milliards de $US.58 Les monopoles dont elles jouissent grâce à la brevetabilité sont d'une portée considérable. Les sélectionneurs déposent des brevets sur des espèces entières (coton), des caractéristiques économiques (qualité de l'huile), des comportements reproductifs de plantes (apomixie) et des techniques de base en biotechnologie (outils de transfert de gènes).

Le Département Américain de l'Agriculture a récemment co-breveté un gène qui rend toute plante de la seconde génération stérile: la technique a pour nom populaire la "technologie Terminator". Le brevet s'étend à toute plante dans laquelle le gène est inséré. Non seulement les agriculteurs devront payer des prix plus élevés pour les semences brevetées, mais ils ne pourront plus les réutiliser. L'ADPIC légalisera et encouragera cette tendance dans les pays en développement.

L'Article 27.3(b) de l'ADPIC rend les DPI sur les variétés végétales obligatoires dans tous les États membres de l'OMC. Les pays en développement ont jusque l'année 2000 pour les mettre en œuvre, tandis que les pays les moins développés ont jusque 2006. Cette disposition sera réexaminée en 1999, probablement parce que des pays ont la possibilité de choisir entre brevetabilité des semences ou des systèmes de DPI sui generis adaptés aux variétés de plantes. Personne ne sait avec certitude en quoi consiste un système sui generis acceptable. Le réexamen de 1999 est une occasion cruciale d'exclure cette obligation de l'ADPIC. Si l'ADPIC n'est pas réexaminé, les pays en développement auront à payer une prime sur leur propre diversité biologique et ils verront leurs marchés semenciers étouffés par les entreprises transnationales et les brevets abusifs. Ceci au détriment des potentiels de sélection inexploités ou non reconnus de leurs propres communautés scientifiques et rurales.

Cette situation présente de sérieuses contradictions avec les négociations sur la biodiversité, comme celle de la CDB et celle de l'Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO), où le Droits des Agriculteurs et le Droits Communautaires sur les matériaux biologiques qu'ils ont développés et préservés pendant des millénaires, sont reconnus comme des droits à priori.

Conclusions et recommandations

Cette analyse des implications économiques de l'ADPIC pour les pays en développement met trois messages principaux en évidence :

L'ADPIC impose un concept erroné de l'innovation.

L'innovation est un processus crucial pour tout pays, développé ou en développement. Les capacités créatrices des citoyens devraient prospérer de telle sorte que les sociétés soient en mesure de résister aux pressions, et puissent envisager de nouvelles options et alternatives pour le développement durable et le bien-être. L'ADPIC se repose sur un concept d'innovation uniquement. Il ne reconnaît pas, et promeut encore moins, les procédés et capacités innovatrices qui font la richesse des pays en développement et sans lesquels ils ne peuvent survivre. Nous nous référons en particulier aux systèmes locaux de gestion et de développement de la biodiversité, auxquels l'économie mondiale et les ressources vivrières locales sont intimement liés. Ces systèmes, les ressources qu'ils génèrent, et la connaissance sur laquelle ils sont fondés, se verront dédommagés par l'adoption de régimes de DPI forts dans les pays du Sud, sous menacés des sanctions commerciales provenant des pays industriels. Les normes de l'ADPIC en matière de nouveauté, de procédé industriel et de démarche inventive n'admettent même pas l'existence de systèmes d'innovation autres que les pratiques occidentales. Cette situation est, à long terme, néfaste pour les pays en développement et intellectuellement rétrograde.

L'ADPIC encourage une seule forme d'incitation – et elle est inefficace.

Il existe de nombreuses formes d'incitation que les gouvernements peuvent offrir aux chercheurs, depuis les subventions pour la R&D dans le secteur public aux allégements des impôts. Les DPI ne sont qu'une option parmi d'autres. Et une option très coûteuse car les monopoles favorisent l'abus, spécialement en l'absence de mesures correctives telles que les lois anti-trusts, et le contrôle des pratiques de licence. Les coûts économiques et démocratiques des DPI en tant que moyen d'incitation à l'innovation – des prix plus élevés des biens à l'accès réduit à l'information – sont extrêmement lourds et les pays en développement ne peuvent se permettre de se reposer sur cet outil comme solution idéale. L'ADPIC bloque la compétition et encourage la consommation passive de technologies étrangères dans le Sud, aux bénéfices des entreprises transnationales. Appliqué à la biodiversité, en laquelle le Sud est formidablement riche, des systèmes monopolistiques comme les DPI bénéficieront à très peu d'acteurs aux dépends de beaucoup d'autres.

L'ADPIC repose sur une analyse incorrecte des coûts et des bénéfices.

L'ADPIC profitera aux pays industrialisés beaucoup plus qu'aux pays en développement. Il est scandaleux que si peu de nations aient le contrôle de l'ensemble des fonds d'investissements et technologiques. Les flux de ces derniers qui étranglent les économies du Sud ne seront pas déterminés par l'ADPIC, mais par d'autres calculs de remboursement en faveur du Nord. Etant donné les rapports de forces actuel et les préjugées fortement enracinées dans le système des DPI, il est tout simplement incorrect de supposer que le Sud aura plus à gagner des systèmes de protection intellectuelle forts sous l'ADPIC qu'il n'aura à perdre.

En tenant compte des difficultés économiques et des aspects sociaux plus larges, les gouvernements, les scientifiques, les groupes d'intérêt public et autres, devraient être encouragés à rechercher des systèmes plus prometteurs pour promouvoir la recherche et développement dans le Sud. Cela devrait concerner :

  1. Le réexamen de l'Article 27.3(b) de l'ADPIC en 1999 devrait exclure l'obligation de fournir toute forme de propriété intellectuelle sur les variétés végétales ou toute autre forme vivante, que ce soit par brevet ou par système sui generis. Ce réexamen ne devrait pas être retardé et ne devrait pas résulter au renforcement des DPI comme le souhaite le Nord.
  2. Le réexamen complet de l'intégralité de l'ADPIC, prévu pour 2000, devrait inviter à une large révision des coûts et des bénéfices de l'Accord pour les pays en développement et les pays les moins développés; et si la conclusion est négative, le traité devrait être abandonné. Une attention particulière devrait être consacrée à la mise en œuvre de l'ADPIC dans le champ de la biodiversité et à la façon dont il affectera la base des ressource économiques, la connaissance indigène, l'éthique et les termes de l'accès à l'information scientifique, aussi bien que le contrôle de l'alimentation et de la médecine dans la société.
  3. Le renforcement de régimes de DPI devrait activement être contrebalancé par d'autres instruments juridiques relatifs à la biodiversité, comme la CDB et l'Engagement de la FAO sur les ressources phytogénétiques. Œuvrer pour construire des DPI en tant qu'outil de partage des bénéfices avec le Sud ou en tant qu'option pour les peuples indigènes, est une tâche qui se base sur des hypothèses incorrectes et sur une analyse obtuse des implications possibles.
  4. Au niveau national, les gouvernements devraient explorer d'autres systèmes pour promouvoir l'investissement, la R&D et la capacité d'innovation technologique. Les droits de monopole sont les moyens les plus coûteux et les plus difficiles à contrôler pour tenter d'y arriver. Presque inévitablement ils bénéficieront aux puissants et aux riches, aux dépends des plus pauvres qui sont pourtant les plus nombreux.

 

Acronymes:

ADPIC Accord sur les Aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce

APEC Coopération Economique des Pays de l'Asie-Pacifique

CNUCED Conférence des Nations-Unies sur le Commerce et le Développement

CDB Convention sur la Diversité Biologique

DPI Droits de Propriété Intellectuelle

FAO Organisation pour l'Alimentation et l'Agriculture des Nations Unies

GATT Accord Général sur les Barrières Dounanières et le Commerce

IED Investissement Etranger Direct

PPP Parité du Pouvoir d'Achat

TNC Entreprises Transnationales

OCDE Organisation pour la Coopération et le Développement Economiques

OMC Organisation Mondiale du Commerce

R&D Recherche et Développement

 

Commerce mondial et biodiversité en conflit est une série d'exposés produits conjointement par la Fondation Gaia et Genetic Resources Action International (GRAIN). Elle examine les éléments critiques du conflit qui se joue entre la privatisation de la biodiversité, dont les moteurs sont les intérêts corporatifs et l'Organisation Mondiale du Commerce, et les efforts d'individus pour renforcer la capacité des communautés locales dans la gestion des diversités biologique et culturelle, en particulier dans les pays en développement.

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Ce numéro de Commerce Global et Biodiversité en Conflit a été traduit de l'anglais par Nathalie Talmasse avec l'assistance de Robert Ali Brac de la Perrière et GRAIN.

 

Notes:

1. Conférence des Nations-Unies sur le Commerce et le Développement, L'ADPIC et les Pays en Développement, CNUCED, Genève, 1997, p. 4.

2. USTR, conclusions au rapport 1988, reprises dans Gregory Aharonian srctran@world.std.com, 'PATNEWS: Pertes Globales de Propriété Intellectuelle pour des compagnies américaines', Internet Patent News Service, 23 octobre 1994.

3. Vickery G., "Réexamen du transfert de technologie", Prometheus, Vol. 4, n°1, 1985; Dunning J., Multinationales, Technologie et Compétitivité, Unwin, Londre 1988; Freeman C., "Le Défi des Nouvelles Technologies", Interdépendance et Coopération dans le Monde de Demain, OCDE, Paris, 1987.

4. Patel S, 'La dépendance technologique des pays en développement', Journal des Etudes Africaines Modernes, Vol. 12, 1974; CNUCED, Tendances dans le Transfert Interational de Technologie vers les Pays en Développement, CNUCED, Genève, 1986.

5. Strange S et Stopford J, Rival States: Rival Firms, Cambridge University Press, 1991

6. Ng S, Pearson A.W. et Ball D.F., 'Strategies of Biotechnology Companies', Technology Analysis and Strategic management, Vol. 4, No. 4, p. 351.

7. Marton K et Singh R, 'Technology Crisis for Third World Countries', World Economy, Vol. 14, No. 2, 1991, p. 199

8. Chiffres de l'UNESCO cités par Nagesh Kumar, 'Technology generation and technology transfers in the world economy: recent trends and implications for developing countries', INTECH Discussion Paper Series #9702, Septembre 1997, p. 11. www.intech.unu.edu/publicat/discpape/9702.htm

9. Jonathan Putnam, 'The value of international patents rights', article non publié, 3 février 1997.

10. Tandis que les pays développés membres doivent amender leurs droits de propriété intellectuelle un an après l'entrée en vigueur de l'Accord (le 1er janvier 1995), les pays en développement membres ont jusque l'année 2000 et les pays les moins développés membres jusque l'année 2006.

11. Les licences obligatoires ont été utilisées par les pays pour accéder à l'exploitation ou à l'utilisation de technologies brevetées sur leur propre territoire. Une licence obligatoire oblige effectivement une entreprise à accorder des droits de licences sur sa technologie, ou sur l'exploitation locale d'un produit, typiquement en échange d'accès aux marchés.

12. Penrose E., The Economics of the International Patent System, Westport, Greenwood Press, 1973.

13. Tableau adapté de Nagesh Kumar, 1997, op. cit., p. 6.

14. Idem, p. 7.

15. Idem, p. 9.

16. Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, IP/STAT/1994/b, OMPI, Genève, Novembre 1996.

17. Nagesh Kumar, 1997, op. cit., p.16

18. Idem, p. 21.

19. CNUCED, Rapport sur l'Investissement Mondial 1997: Entreprises Transnationales, Structure de Marché et Mesures de Compétition – Vue d'ensemble, CNUCED, Genève, 1997, p.2.

20. Idem. Ce chiffre exclut les investissements contrôlés par des mesures non équitables, comme les alliances corporatives.

21. Ronstadt R, 'International R&D: the Establishment of R&D abroad by 7 US multinationals', Journal of International Business Studies, Vol. 8, 1978.

22. Mansfield E et Romeo A, ' Technology transfer to overseas subsidiaries by US-based firms', Quarterly Journal of Economics, Vol. 95, pp. 737-750, 1980.

23. Voir Kamien M et Schwartz N, Market Structure and Innovation, Cambridge University Press, 1982, and Firestone O, Economic Implications of Patents, 1971, University of Otawa Press, Ottawa.

24. CNUCED, Tendances dans le Transfert International de Technologies, 1986, op. cit.

25. Cohen W. M. et Levin R., 'Etudes Empiriques de l'Activité Innovatrice', dans Stoneman P, (ed.), Dictionnaire des Economies de l'Innovation et du Changement Technique, Dictionnaire de l'Organisation Industrielle, Vol. II, Amsterdam.

26. Voir 'A patent cure-all?', The Economist, Londres, 15 juin 1996, pour une discussion de Michael Kremer, 'A mechanism for encouraging innovation', HIID Discussion Paper No. 533, Mai 1996.

27. Kumar N et Siddharthan N, Technology, Technology, Market Structure and Internationalization: issues and policies for developing countries, Routledge et UNU/INTECH, 1997, p. 25.

28. Organisation pour la Coopération et le Développement Economiques, Systèmes d'innovation Nationaux, OCDE, Paris, 1997, et ibid, Mesures Fiscales pour Promouvoir la R&D et l'Innovation, OCDE/GD(96)165, OCDE, Paris, 1996.

29. Suzan K. Sell, 'Intellectual property protection and antitrust in the developping world: crisis, coercion and choice' dans International organization, Printemps 1995, WPF, Massachussetts Institute of Technology.

30. US Information Agency, 'Intellectual Property in the Global Marketplace', Economic Perspectives, Vol. 3, No. 3, USIA, Washington DC, May 1998.

31. Chiffres de Pat Roy Mooney, 'The Parts of Life: Agricultural biodiversity, indigenous knowledge and the role of the third system', Development Dialogue, Fondation Dag Hammarskjöld, Uppsala, Numéro spécial 1996:1-2.

32. William Lesser, 'Economic arguments for and against patents and plant breeders rights' in Equitable patent protection in the developing worl: issues and approaches', Eubios Ethics Institute, 1991.

33. CNUCED, Rapport sur l'Investissement Mondial, 1997, op. cit.

34. Idem.

35. Manjula M. Luthria, Banque Mondiale, 'DPI et pays en développement', dans Technet Think-Tank on IPRs and developing countries, parrainé par la Banque Mondiale et l'OMC, 2 mai 1998. Voir www.vita.org/technet/iprs

36. Gregory Aharonian srctran@world.std.com, 'US academy licensing ' dans Internet Patent News Service, 23 mars 1998.

37. Organisation pour la Coopération et le Développement Economiques, Réforme régulatoire et innovation, OCDE, Paris, circa 1996.

38. OCDE, Brevets et innovation, Paris, 1997, op. cit.

39. Jonathan Putnam, 1997, op. cit.

40. CNUCED, 1997, l'ADPIC, op. cit.

41. Idem.

42. Organisation pour la Coopération et le Développement Economiques, Mesures de compétition et droits de propriété intellectuelle, OCDE, Paris, 1989.

43. OCDE, 1997, Brevets et Innovation, op. cit., p. 23

44. Ronald Hirshorn, 'Foreign Direct Investment and Market Framework Policies: Reducing Friction in APEC Policies on Competition and Intellectual Property', Strategis, No.4, Octobre 1996, Canada, http://strategis.ic.gc.ca

45. Bengston D, 'Exogenous factors affecting research institutions in developping countries', International Journal of Technology Management, Vol.4, 1989, pp. 317-333.

46. Voir, par exemple, Belay Seyoum, 'The impact of intellectual property rights on foreign direct investment', Columbian Journal of World Business, Vol. 31, No. 1, Columbia University Graduate School of Business, New York, Printemps 1996.

47. Japan External Trade Relations Organization, JETRO White Paper on Foreign Direct Investment 1998, JETRO, Tokyo, 1998. www.jetro.go.jp

48. Richard Kozul-Wright et Robert Rowthorn, 'Spoilt for Choice? Multinational Corporations and the Geography of International Production', Oxford Review of Economic Policy, Vol. 14, No.2, été 1998

49. CNUCED, 1997, l'ADPIC, op. cit., p. 17

50. Voir Nagesh Kumar, 'Intellectual Property Protection, Market Orientation and Location of Overseas R&D Activities by Multinational Enterprises', World Development, Vol. 24, No. 4, 1996, pp. 673-687.

51. Pour la décomposition des coûts voir CNUCED, 1997, l'ADPIC, op. cit., pp. 23-26. Il est important de noter que garantir la qualification scientifique du personnel traitant les brevets, et ce pour accommoder l'industrie biotechnologique, est un processus long et difficile dans la plupart des pays, même aux Etats-Unis. Le Bureau des brevets et des marques des Etats-Unis a accumulé un monstrueux retard de trois ans dans le suivi des demandes de brevets, à cause des formations nécessaires du personnel en sciences biologiques.

52. CNUCED, 1997, l'ADPIC, op. cit., p. 2

53. Voir, en particulier, les accords régionaux sur les DPI facilités sous les auspices du NAFTA, le FTAA, de l'Engagement de l'Amérique Centrale, et de l'APEC.

54. Rural Advancement Foundation International, Conserving Indigeneous Knowledge: Integrating two systems of innovation, Programme des Nations-Unies pour le Développement, New York, 1994, p. 17

55. Idem, p. 17

56. CNUCED, 1997, Brevets et Innovation, op. cit., p. 29

57. Voir Gaia et GRAIN, 'Dix Bonnes Raisons pour ne pas Adhérer à l'UPOV', Commerce Global et Biodiversité en Conflit, No. 2, mai 1998. www.grain.org/fr/publications/num2.htm

58. Fédération des industries semencières, 'World Seed Statistics', Genève, 8 juillet 1999. www.worldseed.org/~assinsel/stat.htm